Une jeune Belge à l’assaut de la télévision française.

Soir Illustré 15 novembre 1996

Télévision

« Les femmes n’ont pas de véritable place dans le divertissement »

Une jeune Belge à l’assaut de la télévision française.

Alexandra Bronkers n’a pas vraiment dit son dernier mot.

Alexandra, sans fard

– Dommage, vraiment dommage (pour nous) qu’Alexandra Bronkers (26 ans, originaire de Waremme) ait choisi de faire sa vie à Paris. Intrépide, joyeuse, mignonne à croquer, elle aurait : crevé le petit écran belge. Seulement, voilà : l’appel du large a pris le dessus. A 17 ans, la jeune fille a fait ses valises et est partie pour Cannes, suivre des cours de comédie, de chant et de danse, leçons qu’elle décide de peaufiner ensuite à Paris. Pour pouvoir s’offrir le train de vie parisien dont elle rêve, Alexandra devient mannequin. Arrivent alors les premiers castings télé…

– Ce fut, dans la majorité des cas, le fiasco intégral!, confie-t-elle en toute simplicité. J’essayais tout : les rubriques, les émissions musicales, les jeux… Chaque fois, je me pomponnais pendant des heures; sur le coup, je pensais avoir le job et puis, au dernier moment, hop!, la place était confiée à quelqu’un d’autre. Je finissais par me dire que la télé, ce n’était pas pour moi.

– A tel point qu’un jour, sa belle assurance envolée, Alexandra décida de rentrer en Belgique et de changer son fusil d’épaule. Sa valise était prête. Le téléphone sonna…

– On me proposait de passer un casting pour Nagui. Au point où j’en étais, cette fois-là, j’y suis allée sans y croire. Je m’en fichais ou presque. Je revenais de mon cours de gym. Voyez le tableau : la combi Adidas, ni coiffée, ni maquillée. Chaque fille restait 1/4 d’heure. Je suis restée 3/4 d’heure. Incroyable, mais vrai : j’ai décroché le job !

– Alexandra Bronkers devient alors très officiellement une des Naguettes de Nagui. Ce qu’elle n’a pas manqué d’apprécier, c’est que, contrairement aux autres responsables de production, Nagui fait lui-même ses propres castings. La jeune femme fait ses débuts dans N’oubliez pas votre brosse à dents, sur France 2. Son plus beau souvenir : l’émission du 1er avril, au cours de laquelle Nagui avait fait partir tout le public pour la Tunisie.

– Ensuite, elle anime Mix Monde, un magazine à tendance plus journalistique, sur France 2… durant la nuit. On la contacte alors pour animer Les bons génies, aux côtés  de Patrice Laffont. On la verra par la suite sur TF1, avec C. Jérôme, pour La chanson trésor, une émission qui a bien marché cet été. Elle participe au jury de Pour la vie et, finalement, se retrouve aujourd’hui parmi les invitées privilégiées de La Fureur d’Arthur. Alors, qu’est-ce qu’une jeune Liégeoise peut bien penser du PAF et de ses excès?

–  Il y a eu des excès, c’est vrai mais on oublie souvent que ces gens de la télé que l’on a fustigé ont rapporté énormément d’argent à France 2. Ce qui ne va pas, je trouve, c’est le principe de l’Audimat, auquel les annonceurs sont suspendus. A cause de lui, les émissions n’ont plus le temps de s’installer ni de faire valoir leurs qualités. Je reconnais que les émissions de la RTBF sont de loin meilleures que celles que l’on fait ici. Mais la France offre plus de possibilités. Ce n’est pas qu’en Belgique il y ait moins de talent, mais il n’y a pas les moyens. C’est pour cela, entre autres, que je reprends des cours de comédie. On ne sait jamais ce qui peut arriver. Et puis, jouer dans un film me plairait énormément.

– Il n’y a pas encore d’animatrice qui ait tenu le coup longtemps : une place à prendre ?

– Cela me tue ! Les femmes n’ont pas de place dans les émissions de divertissement. Bravo, Kieffer, Favier… On ne les voit plus. Quand je pense qu’à la télé italienne, les femmes présentent même le foot ! En France, si l’on veut durer, il faut soit être dans l’info (style Chazal, Ockrent, Sinclair…) soit être potiche ou médaillon.

– Si vous aviez été moche, croyez-vous que vous seriez entrée à la télé ?

– Je ne sais pas. Les gens qui ont des problèmes physiques compensent généralement par autre chose et parviennent encore mieux à leurs fins. Je crois que j’aurais pu y arriver et je ne serais pas passée par la case

« potiche »…

– Si vous aviez dû faire autre chose que de la télé…

– J’aurais aimé être grand reporter ou alors travailler dans la décoration ou l’artisanat. Quand j’étais petite, je voulais être chanteuse évidemment !

– Y a-t-il un type d’émission que vous ne cautionnerez jamais ?

– Oui. Les émissions de Pradel. Ces retrouvailles de gens en larmes devant la caméra, cela me choque énormément. Vous savez, hors caméra, cela se passe parfois très mal. Il y a des gens qui n’ont absolument pas envie d’être retrouvés ou que leur photo passe à l’antenne.

– Pourtant, vous étiez dans le jury de Pour la vie et s’il y a bien une émission où tout le monde est en larmes…

– C’est vrai, mais dans ce cas, la démarche est différente: on ne va pas contre la volonté des gens. Les couples décident de jouer pour gagner leur mariage. Les familles posent parfois des questions épouvantables, mais les couples connaissent les risques.

– Qu’ont pensé vos parents de vos choix professionnels.

– Evidemment, ils auraient préféré me savoir à l’univ’… plutôt que dans un métier de « saltimbanque ».

– Vos relations avec les hommes ont-elles changé ?

– C’est devenu beaucoup plus difficile. Je ne sais jamais exactement pourquoi ils viennent. Enfin si, je le sais, mais… est-ce aussi honnête qu’avant ? Je me pose chaque fois la question. Cela dit, dans la vie de tous les jours, c’est difficile pour eux aussi : des gens commencent à me reconnaître. Pour les trips romantiques, ce n’est pas ce qu’il y a de mieux !

– Comment avez-vous vécu les derniers événements en Belgique ?

– On en a parlé beaucoup plus qu’on ne croit, ici à Paris. Ce qui m’a fort émue, c’est le rassemblement des 300.000 personnes. Je me dis que ces fillettes ont dû se sentir aimées par tous ces gens…

Myriam Bru.

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